Soldes à Londres : grandes promotions sur le logement social

En 2000, le gouvernement travailliste s’engage à ce qu’en 2010 l’ensemble des logements sociaux du pays satisfassent à certaines normes de décence et de salubrité.



2005
 Fabien Vaujany

Depuis, les boroughs londoniens font un recours croissant à des formes plus ou moins abouties de privatisation de leur parc social.

L’offre en logement social en Angleterre se divise en deux. Une partie relève de la multitude de Housing Associations, vieilles structures privées aux tailles et aux pratiques très différentes. Le reste est géré en propre par les municipalités, à Londres les boroughs. Depuis l’annonce de l’objectif irréaliste des Decent Homes pour 2010, ceux-ci n’ont de cesse de se poser la question essentielle : où trouver l’argent nécessaire à un tel investissement ?

Dès le départ, l’argumentaire des collectivités locales est simple : ces moyens n’existent pas dans le secteur public. Trois solutions sont alors progressivement imaginées : PFI, ALMO, Stock Transfer. Ces trois options aux noms obscurs, si elles sont différentes, représentent toutes un pas plus ou moins complet vers la privatisation du logement social.

L’Initiative Financière Privée (Private Finance Initiative) est une méthode qui consiste à passer un contrat avec une entreprise privée qui va emprunter et se charger des travaux nécessaires. Elle peut s’accompagner d’une concession de la gestion du parc locatif sur de longues périodes. Afin de couvrir le remboursement du prêt, les éventuels frais de gestion et les profits de l’entreprise, la collectivité lui verse une somme annuelle. L’équation est alors assez simple : de l’addition de taux d’intérêts plus élevés, de la volonté de dégager un profit et de la durée de certaines de ces PFI résulte que cette solution revient plus cher à la collectivité que si elle engageait elle-même les travaux

Elle peut, pourtant, emprunter à des taux plus avantageux, la possibilité virtuellement nulle de banqueroute limitant fortement le risque encouru par la banque lors du prêt. Oui mais voilà, par souci de limiter les dépenses publiques, cela leur est interdit. L’idéal, d’après les directives gouvernementales, est même d’externaliser au maximum tout ce qui est lié au logement afin de le faire disparaître des budgets publics. Et tous les boroughs suivent, s’orientant plus encore vers les deux autres solutions.

L’Arm Length Management Organisation désigne une structure mixte à qui la gestion des logements est déléguée par contrat. Théoriquement dirigée par un conseil regroupant représentants de la collectivité, membres indépendants et locataires, ces derniers sont dans les faits régulièrement marginalisés. L’ALMO est financée par des dotations spécifiques de l’Etat. En d’autres termes, l’argent n’est donné que si une ALMO est mise en place. L’incitation est claire.

La solution du transfert du parc (stock transfer) est la plus aboutie en termes de privatisation. Le borough perd tout simplement la propriété de ses logements en cédant une partie de son parc à une Housing Association. A Londres, une quinzaine de celles-ci dominent le secteur et suivent une logique de promoteurs privés. Le nouveau propriétaire, libre de trouver les financements où il veut, se charge alors d’améliorer les habitations. Cet argent, il le trouve parfois auprès de la collectivité qui en vient parfois à payer pour donner ses logements ! Ou alors, il l’obtient par hausse des loyers et restriction des dépenses, avec pour conséquence une qualité de service pour les locataires diminuée. Une autre possibilité, fréquente, est la vente d’une partie des terrains à des promoteurs privés, entraînant ainsi la disparition pure et simple des logements sociaux.

PFI, ALMO et Stock Transfer ne sont pourtant pas les trois seules solutions possibles comme souhaitent le faire croire les autorités locales mais relèvent purement d’un choix politique. Face à cette marche forcée vers la privatisation et à son coût exorbitant, la campagne en faveur de la « Quatrième option » veut prendre de l’ampleur. Il faut fédérer les locataires, lutter contre le défaitisme ambiant et chercher des soutiens politiques. Déjà certains élus locaux et nationaux, dans les rangs même de la majorité, soutiennent cette option toute simple : investissons directement dans le logement social des boroughs.