Derhadun, la capitale intérimaire, est une ville de 500 000 habitants pourvue d’infrastructures caractéristiques des villes modernes (réseaux de transports, de communications...) et située à quelques heures de Delhi. Je pensais trouver en Gairsain, sa concurrente, une ville de dimension relativement équivalente.
Voila bien mon erreur, Gairsain est en fait un bourg de 6 000 personnes à 1 600 mètres d’altitude où la vie s’organise autour du petit marché principale et de cette agriculture en escalier typique des zones montagneuses. En somme une zone paisible, rurale offrant une vue panoramique sur une vallée magnifique et préservée. Aux premières heures, je considérais mon entourage professionnel indien beaucoup trop idéalistes a mon goût.
Comment peut-on édifier une capitale là où les infrastructures et réseaux de transports sont largement déficients, dans un milieu essentiellement rural où de plus l’environnement y est particulièrement fragile ? Les nombreux débats successifs initiés au sein de mon équipe ont eu raison de mes velléités et j’ai au fil des mois pu m’imprégner des toutes les réalités qui rendent ce projet un vrai challenge pour tous ceux qui s’y piquent.
L’Uttaranchal est un état essentiellement montagneux (93%) à cheval sur l’Himalaya. Il acquiert son indépendance après une lutte vieille d’au moins 50 ans où femmes et hommes donnèrent parfois leur vie pour que soient reconnues les problématiques auxquels sont confrontées les populations rurales montagneuses.
L’ensemble de la population, classe politique confondue, avait largement accepté de faire de Gairsain la capitale. Ce village est géographiquement situé au centre de l’état dans les « moyennes Himalayas ». De fait cette localité est plus accessible par la majorité de la population. Ce choix visait entre autre à favoriser le développement économique des zones montagneuses et l’apport d’infrastructures sociales (hôpitaux, écoles...) largement déficientes dans cette région.
Cependant, suite à un jeu d’alliances politiques lors de la formation de l’Etat, la zone des plaines (bande étroite au pied de l’Etat), où se situe Dehradun, fut renforcée par l’intégration de districts (chaque Etat se subdivise en districts) initialement exclus. Quatre années plus tard le bilan est sévère. La corruption fait rage et malgré son potentiel économique certain notamment en hydro-électricité l’état ne connaît pas le développement espéré dans les montagnes.
Conséquence directe d’un développement à deux vitesse les hommes migrent vers les plaines pour trouver un emploi. Les montagnes se dépeuplent progressivement, les conditions de vie étant devenues trop difficiles. Pour contrebalancer la situation actuelle, notre ambition est de créer une capitale régionale où l’urbanisation s’effectuerait sur plusieurs entités bien reliées entre elles pour diffuser l’urbanisation et ainsi limiter l’impact environnemental sur les forêts.
La décentralisation et l’e-gouvernance sont des thématiques dominantes de notre travail et nous permettent ainsi d’échelonner la planification sur plusieurs décennies. Les communautés seront au cœur des dispositifs de décisions et nous travaillons actuellement a l’uniformisation des système de gestion urbaine (Pan Chayat) afin que la gestion des problématiques urbaines (eau, électricité, déchets, protection des zones agricoles...) soient abordées de manière globale et transversale.